Comité Anti-Amiante Jussieu: Communiqué de presse (05/05/98)

Comité Anti-Amiante Jussieu

Communiqué de Presse
05 mai 1998

POUR UN FONDS D'INDEMNISATION
DES VICTIMES DE L'AMIANTE

Claude GOT vient de remettre son rapport sur l'amiante aux ministres Martine AUBRY et Bernard KOUCHNER.

Nous avons demandé à cette occasion la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Le scandale de l'amiante, c'est en effet aussi celui des victimes qui ne sont pas indemnisées. Actuellement, moins d'une victime de l'amiante sur dix est indemnisée. En outre les indemnisations versées ne sont pas à la hauteur du préjudice subi.

Cette situation est d'autant plus inadmissible que l'amiante provoque des maladies extrêmement graves et très souvent mortelles (cancer de la plèvre, cancer broncho-pulmonaire, asbestose), qui plongent des familles entières dans la détresse. L'ampleur du problème – plus de 2000 décès par an en France sont attribuables à une exposition à l'amiante – et l'écrasante responsabilité des industriels et des pouvoirs publics dans cette catastrophe, rend indispensable la mise en oeuvre de solutions rapides et justes.

La situation actuelle se caractérise par une complète inégalité de traitement entre les victimes de l'amiante, qui ne se justifie pas par des différences dans les circonstances d'exposition ou dans les responsabilités. Seule une infime minorité d'entre elles peut espérer bénéficier d'une indemnisation décente (sinon intégrale).

Les victimes qui n'ont pas été exposées dans le cadre d'une activité professionnelle (exposition environnementale, para-professionnelle ou domestique) ne perçoivent aucune indemnisation.

Les victimes ayant été exposées dans le cadre d'une activité professionnelle sont théoriquement indemnisées dans le cadre du système de réparation des maladies professionnelles. Mais en pratique une grande partie d'entre elles n'est pas reconnue en maladie professionnelle et donc pas indemnisée. Ce dysfonctionnement du système de réparation des maladies professionnelles doit impérativement être corrigé. Mais quand bien même les victimes seraient reconnues et indemnisées, elle ne bénéficieraient que d'une réparation partielle des préjudices subis, car c'est là le principe même du système. Seules celles qui se trouvent dans une situation particulière où la faute inexcusable peut être prouvée ont quelque espoir d'obtenir une réparation complète au terme d'une action judiciaire.

Les victimes de l'amiante accumulent les difficultés qui rendent leur indemnisation par la voie judiciaire impossible: temps de latence des maladies extrêmement long, circonstances d'exposition souvent multiples et extrêmement difficiles à reconstituer, entreprises responsables qui ont très souvent disparu, etc.

La seule solution pour sortir de cette situation est la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. L'objectif premier d'un fonds d'indemnisation serait de permettre une réparation intégrale rapide à toutes les victimes de l'amiante, quelle que soit l'origine de leur exposition, en respectant une présomption d'imputabilité. Pour les victimes pouvant bénéficier d'une rente dans le cadre du système de réparation des maladies professionnelles, le fonds apporterait le complément d'indemnisation nécessaire. Pour celles qui ne relèvent pas du système des maladies professionnelles, le fonds apporterait la totalité de l'indemnisation. Nous souhaitons en outre que ce fonds d'indemnisation soit financé en fonction des responsabilités, et donc en premier lieu par les industriels de l'amiante et leurs assureurs.

Bien évidemment la création et la mise en oeuvre d'un tel fonds relève des pouvoirs publics, qui devraient en outre y apporter une contribution. Mais c'est bien la moindre des choses que les pouvoirs publics contribuent à l'obtention d'une juste réparation pour les victimes de l'amiante. Ils ont une responsabilité énorme pour n'avoir pas voulu (ou au moins pas su) éviter ce scandale de santé publique qui fera des dizaines de milliers de victimes (actuellement plus de 2000 décès par an). Il est impensable qu'ils délaissent maintenant les victimes, qui devraient se battre seules et sans moyens pour tenter d'obtenir la réparation qui leur est due. Il n'est pas imaginable non plus que les industriels de l'amiante échappent à leurs responsabilités et ne soient pas condamnés à réparer les dommages qu'ils ont causés.